Éditorial | 26/07/2012

L'Europe a démontré que le plus court chemin n'était pas la ligne droite !

La lettre d'information - juillet 2012

Les mesures que le dernier sommet européen vient d’arrêter constituent un tremplin vers plus d’unification : l’objectif à atteindre permet à l’Allemagne de proposer un renforcement de l’intégration économique et politique au sein de l’Euro zone sous contrainte budgétaire.

Cette avancée appréciable a, en outre, pour effet d’élargir les capacités d’une BCE toujours hésitante à outrepasser des pouvoirs mal délimités vers un rôle de supervision du secteur bancaire de la zone Euro. A l’évidence, l’urgence pour contrer le caractère explosif d’une Europe en quasi-récession a balayé, au moins pour un temps, les réflexes de sauvegarde de souveraineté. Ces avancées fédéralistes tracent le chemin vers l’instauration d’une union bancaire à horizon 2013, puis potentiellement vers plus de solidarité budgétaire et économique à plus long terme. Les crises ne font-elles pas avancer l’histoire ?

Ce dernier trimestre a affiché des indicateurs économiques contrastés, parfois même contradictoires. La décélération de l’activité est maintenant indéniable partout dans le monde et le PIB de la zone Euro au deuxième trimestre devrait s’afficher en déclin. Plus inquiétant encore est de constater que l’Allemagne, locomotive européenne, multiplie, elle aussi, les signes de ralentissement. Une récession technique semble désormais inévitable en Europe, comme l’anticipent d’ailleurs les instituts de conjoncture allemand (IFO), français (INSEE) et italien (ISTAT) tout en restant plus positifs pour la fin de l’année. Cette prévision est cependant entourée d’aléas dont la croissance des marchés émergents et de l’économie américaine sont les principaux et donc pas des moindres ! En effet, l’économie européenne, en récession, subissant l’austérité nécessaire au désendettement des Etats et des banques et affichant une dégradation du marché du travail peu propice à la demande interne et à la confiance, a besoin de ses partenaires extérieurs pour sortir de l’ornière et se structurer autour d’une demande mondiale. Les exportations pourraient être favorisées par un euro faible et redeviendraient ainsi un booster de croissance. Nous serons donc particulièrement attentifs à l’évolution de la conjoncture Outre-Atlantique et dans les principaux pays émergents. Si des politiques monétaires et budgétaires accommodantes peuvent être largement envisagées en Chine, en Inde ou au Brésil, la situation américaine est moins évidente à court terme.

Au niveau politique, en Europe, la restauration de la confiance devrait être la principale vertu des « décideurs » malgré des messages parfois peu lisibles, des atermoiements et un rigorisme exacerbé des pays d’Europe du Nord. La mise en œuvre progressive des mesures décidées fin juin, et susceptibles de rassurer sur les risques souverains et financiers, devrait permettre une baisse de l’aversion au risque sur les marchés. En franchissant à la baisse le seuil des 1% de son taux directeur quelques jours après le sommet, la BCE a exprimé un soutien implicite aux dirigeants européens et aux projets envisagés. Il reste maintenant à les mettre en musique…

L’absence de gouvernance économique et politique reste encore un frein au traitement des multiples difficultés rencontrées par la zone Euro. Toutefois, la volonté de pérenniser l’Euro, fortement exprimée par l’ensemble de ses membres, éloigne maintenant le spectre d’un éclatement. Si les nombreuses étapes encore à parcourir, et vraisemblablement semées d’embûches, ne peuvent laisser supposer un retour rapide à une situation stabilisée, nous voyons d’ores et déjà se dessiner les contours d’une Europe plus structurée.

Dans ce contexte, nous pouvons espérer une réduction de la décote politique sur les marchés européens, d’autant que les valorisations restent faibles même si les perspectives bénéficiaires peuvent sembler surestimées, notamment pour 2013. La décote des valeurs européennes par rapport à leurs homologues américaines et asiatiques est massive et, si nous demeurons vigilants face à la situation dans la zone Euro et à la conjoncture mondiale, nous pourrions être amenés à adopter une vision plus positive dans les semaines à venir. Privilégiant toujours les valeurs internationales de croissance, il est néanmoins envisageable que nous revenions de manière tactique vers des valeurs européennes domestiques décotées. Souhaitons qu’une amélioration du climat politique en Europe ne s’accompagne pas d’une dégradation trop forte de la conjoncture de part le monde, auquel cas le rebond européen ne serait qu’un feu de paille…

Rédigé le 19 juillet 2012