Éditorial | 12/04/2024

A quand la fin de " Boucle d'Or " ?

Cogefi Gestion

La lettre de Gestion Privée - avril 2024

Le scénario idéal anticipé par les investisseurs fin 2023, combinant le pivot des banques centrales avec une économie « ni trop chaude ni trop froide », s’est poursuivi au cours de ce premier trimestre comme dans le conte pour enfants « Boucle d’Or » !

Les indices ont ainsi atteint des niveaux records. Aux États-Unis, ce sont les valeurs technologiques qui ont à nouveau porté la bourse, dopées par l’engouement autour de l’intelligence artificielle, et créant un phénomène d’ultra-concentration de marché. Rappelons que la performance du S&P au premier trimestre a été réalisée à hauteur de 60% par seulement six valeurs, dont Nvidia qui a contribué à elle seule pour 29%.

Pourtant, le recalibrage des anticipations en matière de baisse de taux pour 2024 aurait pu faire dérayer les indices. De six baisses attendues fin 2023, les attentes sont passées à trois au cours du trimestre, se calant sur le scénario des banquiers centraux. L’euphorie autour de l’intelligence artificielle et la résilience de l’économie américaine ont manifestement détourné les marchés de ce risque.

En effet, le scénario central pour l’économie a beaucoup évolué, passant fin 2023 de « hard ou soft landing », à « no landing » fin mars. Dopée par une consommation toujours résiliente, l’économie américaine se porte bien. Ainsi, la banque centrale américaine a été amenée à revoir significativement en hausse ses prévisions de croissance pour 2024, passant de 1,4% à 2,1%. Grâce au cumul de l’effet richesse lié aux marchés, de la progression du salaire réel en lien avec la baisse de l’inflation et du marché de l’emploi toujours robuste, les Américains ont continué de consommer. Cette tendance n’a pas souffert du renchérissement du coût du crédit et du dégonflement de leur niveau d’épargne. En dehors des États-Unis, les premiers signes de reprise apparaissent, notamment au niveau de la production industrielle chinoise ou encore allemande.

Même si ce n’est pas encore d’actualité, le risque est que cette résilience économique soit si forte qu’elle puisse à nouveau entraîner le retour de l’inflation. D’autant qu’avec l’intensification des menaces géopolitiques, de nouvelles tensions sur le prix du pétrole sont apparues, passant de 75 $/b en début d’année à 90 $/b fin mars. Le pivot des banques centrales pourrait alors être retardé, voire décalé à 2025...

Dans un contexte où la visibilité et la croissance économique se confirment, les valeurs cycliques pourraient progressivement prendre le relais de celles de croissance jusqu’ici privilégiées. Ces dernières constituaient jusqu’alors un refuge face au manque de visibilité économique et profitaient des anticipations de baisses de taux.

Ainsi, nous avons déjà commencé à anticiper dans les portefeuilles cette rotation avec des prises de bénéfices sur certaines valeurs, pour des repositionnements sur des entreprises moins chères, et qui pourraient surprendre positivement lors des prochaines publications grâce à la vigueur du cycle. A titre d’exemple, certains titres du luxe, dont la croissance devrait se normaliser en 2024 après trois années exceptionnelles, ont ainsi été arbitrés en faveur de valeurs industrielles.

 

Rédigé le 9 avril 2024