La Lettre de Gestion Privée | Juillet 2025
Guerre et paix
La guerre commerciale lancée début avril par l’administration Trump, puis le conflit entre Israël et l’Iran, rapidement suivis d’une intervention militaire aérienne américaine sont autant d’éléments anxiogènes qui auraient pu faire dérailler durablement les marchés.
La réalité boursière a été toute autre au cours de ce 2ème trimestre. Car si la volatilité a été de mise, le rebond européen s’est confirmé, les émergents ont gagné du terrain et le marché américain est repassé en territoire positif (en $) après un début d’année difficile. Pourquoi une telle résistance ?
Le risque inflationniste reste dans tous les esprits avec la mise en place des taxes douanières et la hausse ponctuelle des prix du pétrole liée aux tensions au Moyen-Orient. Mais pour le moment, établie à 2,4% l’inflation reste sous contrôle aux États-Unis, passant même sous le seuil cible de 2% en Europe, à 1,9%. Si l’inflation ne redécolle pas sensiblement en juillet, il y a fort à parier que la Banque centrale américaine entamera un cycle de détente monétaire propice à alimenter la hausse des marchés. Avec un taux directeur à 4,5%, la FED a une politique plus restrictive que celle de la BCE qui a abaissé son taux à 8 reprises pour atteindre 2%. Tout dépend maintenant des niveaux de taxes douanières qui seront négociés entre les pays après la trêve de 90 jours, et applicables au 1er août. Cependant, si le scénario initial présenté lors du « Liberation Day » était alarmant, les premières avancées des négociations commerciales semblent plus mesurées, convergeant autour d’un taux moyen estimé à 15%.
Un autre point d’attention des marchés reste la croissance et l’impact des incertitudes politiques sur l’activité. Faut-il craindre un ralentissement marqué ? Aux États-Unis, si les derniers chiffres de l’emploi ont montré un premier recul en juin, signe d’un certain attentisme de la part des entreprises, l’activité manufacturière accélère et les services se maintiennent. Les droits de douane impacteront inévitablement la croissance, qui pourra néanmoins être en partie compensée par les baisses d’impôts et la dépréciation du dollar qui favorisera la compétitivité américaine. En Europe, le déploiement du soutien budgétaire visant à augmenter les dépenses d’infrastructures et de défense, particulièrement en Allemagne, associé à la politique monétaire accommodante, stimuleront automatiquement la croissance. En Chine, la résistance de l’économie face à la tourmente des droits de douane reste un élément d’incertitude.
Le facteur de risque central aux États-Unis demeure le déficit budgétaire américain, et ses conséquences sur le niveau des emprunts d'État, les T-Bonds. En 2025, la dette fédérale américaine va franchir les 36 000 Mds$, soit plus de 130% du PIB ! De plus, le budget récemment voté creuserait le déficit de 3 400 Mds$ sur 10 ans selon le Congressional Budget Office, cumulant 4 600 Mds$ de nouvelles dépenses contre seulement 1 200 Mds$ d’économies et de recettes. Ainsi, de nouvelles tensions sur les taux américains ne sont pas à exclure.
Dans ce contexte, nous continuons de privilégier les actifs européens dans nos allocations. Nous avons augmenté le poids de l’Allemagne à travers une exposition renforcée sur les infrastructures, la construction et les banques. La thématique de l’électrification reste également bien présente dans nos investissements. En parallèle, nous limitons notre exposition au dollar, en sous-pondérant les obligations et actions américaines, à l’exception des valeurs technologiques qui concentrent la croissance des résultats futurs. Les émergents, dont les dettes sont libellées en dollar, devraient bénéficier de la baisse de la devise américaine, ce qui constitue selon nous une opportunité.
Rédigé le 10 juillet 2025